Comment travaillez-vous avec les « autres » en tant que fondation philanthropique ? Les « autres » peuvent être des gens que vous ne connaissez pas, qui ne partagent pas les mêmes opinions que vous, ou qui ont des attentes, des motivations ou des responsabilités différentes. Est-ce possible ? Est-ce nécessaire ? Et le jeu en vaut-il la chandelle ? Lors du récent colloque de FPC à Calgary en Alberta, les fondations ont exploré ces questions sur le thème de La collaboration sans frontières.
Les fondations ont de bonnes raisons d’examiner la collaboration sans frontières en ce moment. Le Canada et le monde sont confrontés à des problèmes à la fois urgents et complexes. Et il n’existe pas de large consensus sur les solutions, loin de là. Face à cette complexité et cette polarisation, les fondations peuvent comprendre que l’adoption d’une perspective ou d’une approche individuelle ne va pas les amener bien loin. Quand personne n’a de réponse, les gens doivent unir leurs efforts pour trouver une solution. Comme Allyson Hewitt de MaRS, modératrice du panel d’ouverture de la conférence, l’a indiqué de façon concise : « Nous devons tous apporter une contribution. »
Qu’avons-nous appris à Calgary concernant la collaboration sans frontières ? J’ai entendu de nombreuses conversations réfléchies sur les qualités requises pour réussir. Allyson Hewitt et James Stauch de l’Université Mount Royal ont efficacement défini la situation et résumé leur point de vue dans leur discours d’ouverture et de clôture. En réfléchissant à leurs commentaires, j’ai pensé aux quatre idées clés interconnectées sur la collaboration sans frontières pour les fondations : le temps, la flexibilité, la confiance et le courage.
Le temps est important et il nous en faut toujours plus, notamment pour que tout le monde arrive à un consensus concernant le problème en cours de résolution (comme Allyson l’a fait remarquer, parfois, au début, vous arrivez seulement à vous mettre d’accord sur les éléments de base : « Oui, le tapis est un tapis ».) Lorsque vous rencontrez les « autres », cela prend du temps de comprendre leurs réalités. Beaucoup de choses ne sont pas ce à quoi vous vous attendiez. Le fait de prendre le temps de comprendre les autres est un préliminaire nécessaire à l’action, et est une action en lui-même.
La flexibilité est souvent l’élément qu’il vous manque en tant que fondation lors d’une collaboration. Les responsabilités et les attentes des autres intervenants peuvent être rigides (pensez à une fondation privée qui collabore avec une grande société ou un ministère). De plus, l’environnement réglementaire des organisations caritatives canadiennes est une contrainte qui manque de souplesse et ne facilite pas le processus de collaboration dans l’ensemble des secteurs. En effet, les réglementations de l’ARC peuvent freiner ou empêcher le travail de collaboration entre les organisations caritatives et non caritatives. Les directives et les opinions de l’ARC ne démontrent pas de souplesse lorsqu’elles se basent sur l’évaluation du risque ou les antécédents. Cela peut donc entraver un travail utile et nécessaire. En revanche, les fondations privées peuvent être plus souples que d’autres intervenants, et peuvent utiliser cette flexibilité pour faire preuve d’innovation et de créativité dans leurs activités. Elles peuvent aussi accepter plus d’ambiguïté, ce qui peut être important quand les résultats sont incertains.
La confiance est certainement le fondement de toute bonne collaboration. Elle est fondamentale pour établir des relations qui permettent aux collaborations de s’épanouir et aux collaborateurs de travailler ensemble sur un problème. Bien sûr, cela prend du temps de développer la confiance. Cela demande aussi une volonté d’aller au-delà de ce qui est connu ou sécuritaire afin d’établir et de prouver sa confiance. Les fondations peuvent apprendre à développer leur confiance, si elles ont déjà le courage d’essayer de collaborer sans frontières.
Le courage est absolument nécessaire pour collaborer sans frontières. Vous avez besoin de courage en tant que fondation pour entreprendre des collaborations. Vous avez besoin de courage pour prendre des risques en faisant quelque chose qui peut n’avoir jamais été fait ou qui n’a aucune garantie. Et avoir le courage d’être vulnérable aux échecs. En outre, il faut du courage pour s’engager avec des « suspects inhabituels ». Ceux-ci pourraient être des critiques ou des opposants au statu quo (p. ex., des jeunes leaders qui remettent en question la façon de faire les choses, ou des responsables communautaires qui ne reconnaissent pas les décideurs, ou des dirigeants d’entreprise qui s’opposent à « l’économie verte par rapport à l’emploi »). Les fondations ont besoin de courage pour s’impliquer dans les perturbations.
Le temps, la flexibilité, la confiance et le courage. Pour faire quoi ? Les conférenciers ont suggéré que les choses les plus importantes que les fondations peuvent faire lors de leur collaboration sans frontières sont d’encourager les conversations et la réflexion afin de développer la confiance et les relations. James Stauch a expliqué dans son résumé des idées clés : « Le rôle de la philanthropie est essentiel pour combler le fossé, pour promouvoir les contre-discours au raisonnement binaire simpliste, et pour démontrer des modèles communautaires et économiques alternatifs… Les relations sont indispensables non seulement pour aller au-delà des frontières, mais aussi pour co-créer un nouvel avenir. » Stauch a conclu que les grands défis des fondations étaient de : « Contribuer à la prospérité des communautés dans un monde sous contrainte carbone. Aider à sauver et renforcer la démocratie dans un monde en quête de vérité. Et changer nos institutions, nos réseaux et nous-mêmes pour y arriver. » Avec le temps, la flexibilité, la confiance et le courage.